Daniel Ducharme

Ce qui nous attend

L'idée est encore et toujours d'écrire chaque jour, pour ne pas oublier, pour ne pas que j'oublie, surtout, parce que parfois j'ai l'impression que mon cerveau part en vrille. Et je ne crois pas que ça va s'arranger dans les années qui viennent. Aujourd'hui, un planning déplorable : je vais au garage pour la pose des pneus d'hiver, même s'il fera jusqu'à vingt degrés. Sans doute un effet du dérèglement climatique dû à l'augmentation de la population. Au fond de moi, je sais que le monde, du moins le monde tel qu'on l'a connu, tire à sa fin. Jamais les humains seront assez conscients, assez solidaires, pour renverser la tendance. Je n'ai qu'à voir les voitures qui pullulent dans nos rues : plus de deux véhicules sur trois sont des V.U.S., des grosses bagnoles polluantes, électriques ou pas. Avec les prix immodérés qu'a atteint l'immobilier, les inégalités sociales vont se creuser davantage. Ceux qui tirent leur épingle du jeu s'en sortiront et vivront comme des planqués, comme ceux qui vivent dans de grosses maisons, disposant d'un système de sécurité à toute épreuve. C'est ainsi que les hommes vivent, écrivait Aragon, mais leurs baisers au loin ne suivent personne, restant cantonner à leurs proches, ne dépassant pas le cadre de leur porte. Chacun pour soi, et tout le monde contre tout le monde. Bref, on n'aime que soi.

Trouver la sérénité en soi. Il n'y a pas d'autre solution. Marcher dans une rue paisible en écoutant de la musique, une symphonie ou un quatuor à cordes, surtout ceux de Joseph Haydn, le maître en la matière. Lire un bon bouquin, le soir, assis dans un fauteuil, ignorant les nouvelles qui tournent en boucle sur les chaînes d'information continue à la télévision, bien que je reconnaisse que les élections américaines puissent être divertissantes. Après tout, ce n'est pas notre pays. Ce pays, le nôtre, empêtré dans des contractions sans fin, mêlant intérêts et valeurs, il vaut mieux l'oublier. Comme il vaut mieux s'oublier soi-même en faisant le vide en soi. Le vide, le néant, c'est tout ce qui nous attend, au fond.


2024-10-25 : existence, environnement, société