Daniel Ducharme

Grosses bagnoles

À la fin de mars, j'ai accompagné mon fils à la Clinique de la Vision de l'Université de Montréal. Je ne suis pas un gars envieux par nature, mais sur le chemin aller-retour entre les quartiers Côte-des-Neiges et Rosemont, et dans les rues avoisinantes de l'Hôpital Juif (dans lesquelles j'ai tenté vainement de me garer), j'ai vu au moins trois Jaguar, quatre Porsche, deux Range Rover, des Mercedes et des Audi en nombre suffisant pour que je ne puisse pas les compter, ainsi que plusieurs VUS de luxe, de type Infinity et Acura. Chacun fait ce qu'il veut avec son pognon, mais autant d'argent mis dans une voiture, alors que le quartier fourmille de sans-abri, de miséreux et de pauvres gens qui s'entassent à plusieurs dans des appartements hors de prix dans les rues situées à l'ouest de l'avenue Côte-des-Neiges, me laisse un goût amer, ébranlant la quiétude de ma conscience.

Autrement dit, j'en suis ressorti écœuré. Pourquoi ? Je ne sais pas. Une question de pudeur, sans doute. Du catholicisme résiduel, peut-être. Je l'ignore, mais ça m'écœure, c'est tout. Et puis, cette simple observation contraste avec ce que je lis chaque jour en ouvrant La Presse numérique le matin : de la misère, de la pauvreté, des gens qui ne savent plus où se loger, etc. Le contraste est là : la pauvreté à chaque page du journal alors qu'une simple balade dans le quartier Côte-des-Neiges nous détrompe. On ne sait plus quoi penser à la fin... Montréal est-elle vraiment un ville riche ? En tout cas, ce n'est pas l'impression qu'elle laisse à ceux et celles qui se baladent dans ses rues. On ne peut traverser une artère sans voir des déchets, des cônes oranges, et je ne parlerai pas de tous ces sans-abri avec lesquels il faut mieux vivre, les valeurs de l'inclusion étant clamées un peu partout par les autorités politiques. Aujourd'hui même sur une chaîne de la radio publique, j'ai suivi une discussion entre l'animatrice et une travailleuse sociale qui parlaient de la consommation de crack comme un besoin - légitime comme n'importe quel besoin ressenti par les êtres humains. L'inclusion, écrivais-je ci-dessus, c'est ce que ça veut dire et, à moins que vous proniez des valeurs conservatrices, voire de droite, vous êtes bien obigés de la revendiquer comme une valeur dans la panoplie des valeurs actuelles.

Revenons à mon propos, soit une indignation relative face à toutes ces voitures de luxe qui parsème les rues de notre ville, de ma ville, en fait, celle où je suis né, dans un quartier d'ailleurs où je n'ai plus les moyens de m'installer. Enfin, je vous l'accorde, ce texte ne rime à rien. Restons-en là.


2024-08-19 : société